les erreurs de notre société et la raison

En ce matin d'octobre, le Jura, face à moi, découvre ses reliefs. Le ciel, éclaboussé de rouge, montre que la beauté ne peut disparaître aux yeux de ceux qui s'attarde à la voir.
Mais, le Monde court, la société s'affole et ceux qui perdent la foi doutent de l'Homme et de ses possibilités à devenir grand.

nous pourrions

Nous pourrions épiloguer sur les erreurs de notre société, sur l’incompréhension entre les êtres et les peuples, sur les injustices génératrices de souffrances, sur l'égoïsme et le racisme. Nous pourrions également trouver des moyens de plus en plus drastiques de lutter contre la corruption, construire des prisons de plus en plus performantes pour empêcher les malfaiteurs et les criminels de nuire, nous pourrions aussi formater notre âme afin qu’elle ne souffre plus de sa sensibilité, nous blinder contre les coups durs et nous mettre à l’abri du besoin par la richesse et la possession.
Oui, nous pourrions faire cela.
Nous ne serions pourtant pas à l’abri de l’essentiel : le besoin de l’Homme d’être heureux, de répondre par l’affirmative à la lumière de son idéal, de chercher la beauté dans chaque souffle de vie et, sans pouvoir y échapper, de rêver à l’amour et aux grands thèmes des valeurs fondamentales sacralisées par la création de ce que nous appelons la foi.
Si nous refaisions notre histoire et que nous imaginions l’espace d’un instant que le souffle de la spiritualité n’est plus l’apanage de nos religions, mais simplement une philosophie d’exister, une manière de traverser notre vie et de comprendre nos expériences, nous serions alors capables de réaliser concrètement ce dont nous rêvons secrètement et cesserions de penser que la raison doit l’emporter sur l’utopie.

la raison

Mais la raison n’est pas ce que nous en avons fait. Nous l’avons confondue avec obligation et contrainte. Elle est, au contraire, la méthode capable de concrétiser notre idéal dans les meilleures conditions. Issue de notre intelligence, elle ne nous limite pas dans notre développement, mais nous offre les moyens d’élargir nos facultés, de faire naître et de réaliser nos rêves.
Cette nouvelle perception de nous-mêmes nous ouvrirait alors à d'autres concepts et à la vérité incontournable que nous sommes les maîtres de notre bonheur et de l’évolution heureuse de chaque peuple. N’avons-nous pas inventé le terme "fatalité" pour nous prouver que nous ne sommes pas responsables et afin de laisser libre cours à nos nombreuses justifications ?

nous sommes si semblables

L’Humanité est composée d’êtres multiples, de toutes cultures et de toutes religions... Mais nous sommes pourtant si semblables. Face à la douleur et à la joie, femmes et hommes, jeunes et vieux, de toutes couleurs ou de toutes latitudes, nous éprouvons les mêmes sentiments et les mêmes émotions, les mêmes besoins d’aimer et d’être aimés, les mêmes frustrations et les mêmes colères.
Notre siècle peut-il alors cacher ses plaies et ses erreurs de jugement derrière la différence qui sépare les peuples ? En élargissant notre regard, non sur le Monde mais sur nous-mêmes, nous comprendrons que les solutions sont à notre portée.

d'abord cesser de croire que la peur nous protège

Ensuite, refuser de penser que la raison exige le renoncement à l’imagination et au rêve. Enfin, s’interdire toute compromission et agir comme si nous n’avions rien à perdre ; car nous n’avons rien à perdre mais tout à y gagner.

le pouvoir et la réussite

L’Homme ne se résoudra jamais à la petitesse. Il se voudra toujours plus grand. C’est ainsi que certains accumulent pouvoirs et possessions et que d’autres les envient tout en éprouvant un sentiment d’injustice et d’infériorité.
À l’évidence, notre société nous enseigne une seule facette du pouvoir, inaccessible à la majorité. L’autre facette, accessible à tous, est occultée par la non-connaissance, les tabous et les préjugés.
Dès sa naissance, l’enfant est formaté par des concepts erronés ne lui permettant de respecter ni sa personnalité ni son idéal. C'est ainsi que la peur, le doute et la culpabilité l’inciteront à fermer ses sens à ses multiples possibilités de découverte et de réussite. Nous sommes suffisamment intelligents pour admettre que notre décision d’obéir à des conventions est tout aussi aléatoire que celle de répondre à notre idéal de fraternité, de bonheur et de paix.
Qui nous dit que ce sacrifice nous rendra justice et que la société nous en sera reconnaissante ?

nos immenses aptitudes

Nous sommes capables de déceler nos immenses aptitudes à œuvrer à l’élaboration d’une vie dans laquelle l’idéal, la fraternité et un large regard aimant sur le Monde seraient capables de côtoyer réussite matérielle et respect de nos propres besoins, de notre individualité et de notre liberté.
Une personne, une communauté, un peuple sont les éléments d’une société représentative de ce que nous pensons, voulons et, de ce fait, construisons. Pour cette raison, notre force incommensurable doit être reconnue, comprise et éduquée pour que nous n’en soyons pas les victimes consentantes.
La société, assemblage de tous ces éléments, est ce que nous faisons d’elle et ce que nous croyons qu’elle sera. Elle peut devenir ce dont nous rêvons et ce que notre détermination lui demande ou rester notre pire ennemie et la raison de notre douleur.

La beauté ne disparaîtra jamais de l'Homme. Comme je regarde ce ciel éclaboussé, apprenons simplement à la contempler et à lui redonner ses lettres de noblesses.

22 octobre 2011
Martine Libertino
Présidente de l’Association Duchamps-Libertino

 

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